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CROISSANCEPLUS
5 mars 2013

CREATION D'UNE NOUVELLE SOCIETE NATIONALE PETROLIERE, une Interview de Maxime KAMGA

EMERGENCE DU GABON / CONTRIBUTION DU SECTEUR PETROLIER

 

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Entretien avec notre Consultant, Monsieur Adrien Vangsy TATY

 

«Le Gabon n’est pas un pays producteur de pétrole !

Le pays a des richesses, mais ne les produit pas »

En prélude à la création d’une société nationale pétrolière au Gabon, nous vous avons livré – dans notre précédente édition – les éclairages de notre consultant Monsieur Adrien Vangsy TATY. Fort de son parcours universitaire, professionnel et de son expérience sur le terrain, l’homme jusque là très discret nous a exposé les bases conceptuelles d’une nouvelle société pétrolière au Gabon notamment les différentes approches juridiques et statutaires, leurs avantages et inconvénients, ses missions et sa structure organisationnelle.

A la suite de cette publication, les différents échos positifs qui nous sont parvenus allaient les uns, dans le sens de saluer la démarche et d’autres qui souhaitaient, à la suite de cet exposé, la mise en évidence du rôle de cette nouvelle société dans la construction effective d’un Gabon Emergent. C’est pour répondre à cette deuxième préoccupation de nombreux lecteurs que nous avons eu un entretien avec notre consultant. L’homme nous est apparu très à l’aise, persuasif et optimiste quand aux retombées économiques de ce projet. Lisez plutôt !

Propos recueillis par Maxime Kamga F.

 

 

Croissance+ : Bonjour Monsieur TATY !

Vous avez signé un article dans notre précédente édition. Article dans lequel vous  démontrez comment pourrait se finaliser la création d’une société pétrolière au Gabon, société  actuellement lancée sur ses fonds baptismaux.

Après publication de votre article, de nombreux lecteurs sont curieux de savoir comment vous entrevoyez  le rôle de cette nouvelle société dans le cadre d’un Gabon Emergent ?

 

Adrien Vangsy TATY : (visage décontracté…) Je tiens à vous dire merci pour l’opportunité que votre journal m’offre pour apporter ma modeste contribution à la construction d’un Gabon Emergent. Il faut préciser que mon exposé publié dans votre précédente édition s’est limitée à la première partie. Pour répondre à la préoccupation des lecteurs, je soulignerai que la société nationale pétrolière - actuellement lancée sur ses fonds baptismaux - devrait être une société de grande envergure, verticalement intégrée et qui devrait  ouvrir des perspectives réelles de développement tous azimuts pour notre pays, en jouant notamment le rôle de locomotive pour l’ensemble des autres secteurs de notre économie…..

 

Quand vous parlez de verticalement intégrée, à quoi faîtes vous allusion en de termes plus simples ?

Je parle de verticalement intégrée pour la simple raison que cette société devrait s’activer sur l’ensemble de la filière des hydrocarbures, c'est-à-dire avoir une maîtrise de l’amont et de l’aval pétrolier. En d’autres termes du puits jusqu’à la pompe.

Dans votre exposé relatif à la création de la société nationale pétrolière, vous avez surpris plus d’un lecteur notamment lorsque vous préconisez plutôt la création d’une société de type mixte, c'est-à-dire une société à capitaux ETAT/PRIVE en lieu et place d’une société à cent pour cent ETAT (100%) mais dont l’Etat Gabonais serait largement majoritaire, avec près de 80 à 85% des parts !  Quelles sont les raisons de cette approche ? 

(Leger sourire…) Les raisons de cette approche sont de plusieurs ordres ! La première est que l’industrie pétrolière est par définition une industrie hautement capitalistique, c'est-à-dire qui demande d’énormes moyens financiers, et également d’énormes moyens techniques mais aussi humains. Toutes choses indisponibles pour le moment. La deuxième,  c’est qu’en faisant rentrer dans son capital d’autres acteurs notamment des multinationales pétrolières, plus aguerries, techniquement et financièrement, notre société nationale pétrolière, pourrait ainsi tirer des bénéfices. Et ce, sur plusieurs plans notamment celui du parrainage, de l’expérience et du savoir faire de partenaires mieux outillés. Sur  d’autres plans, cela constituerait une opportunité réelle, de placement des produits bruts et finis de la Gabon Oil Company (GOC) à l’international et aussi  des prises de participations dans des marchés extérieurs à forte valeur ajoutée…

 

Votre discours, même s’il est cohérent, a parfois du mal à passer quand on sait que le Gabon est un pays producteur d’hydrocarbures depuis près d’un demi siècle. Tous les analystes sérieux et même le peuple voient bien que le pétrole n’a réellement pas été  d’un grand bénéfice pour  le pays. Beaucoup de pays à l’instar de la Guinée Equatoriale mettent en place des stratégies de diversification de leur économie. En quoi le création d’une société nationale pétrolière pourrait booster aujourd’hui le Gabon?

 

Je souhaiterai - et si vous voulez bien me l’accorder - apporter un correctif en disant que le Gabon n’est pas un pays producteur d’hydrocarbures, c’est un abus de langage, un lapsus linguae, une illusion savamment entretenue dans notre imaginaire collectif et qu’il faut effacer, car elle est la source d’une grande désillusion. Le Gabon possède dans son sol et son sous-sol des richesses minières, gazières, pétrolières etc.,  mais ne produit pas ces richesses…En conséquence, le Gabon n’obtient que le pourcentage de parts qui a été défini d’accords parties entre lui et ses partenaires économiques pétroliers (généralement entre 20 et 25%).

La grosse différence aujourd’hui avec la mise en place d’une société nationale pétrolière, c’est que le Gabon pourrait enfin devenir réellement producteur de ses richesses pétrolières et gazières et insuffler ainsi une nouvelle dynamique à l’ensemble de son économie. Il faudra retenir que c’est cette illusion de « GABON PAYS PRODUCTEUR DE PETROLE » qui étonne du fait que le  pétrole  n’a pas eu à ce jour des effets d’entraînement réel sur le reste de l’économie, qu’il n’a pas permis un décollage réel de notre économie et encore moins assurer le développement du pays ! En effet, avec sa mince part obtenue du partage de la production, le secteur pétrolier au GABON, reste un secteur à très faible valeur ajoutée et que cette valeur ajoutée est plutôt visible dans les pays d’origine des partenaires économiques et industrielles qui exploitent le pétrole au Gabon(idem pour les Mines et le secteur Forestier) 

 

Votre argumentaire semble très persuasif, mais dites nous quel serait de manière globale la contribution de cette nouvelle société à la consolidation économique et industrielle du pays ? De façon concrète ?

C’est assez simple de le relever. Cette société aura la maîtrise de toute la filière amont et aval de l’activité pétrolière, à l’instar des grandes sociétés pétrolières occidentales tant nationales que multinationales, qui sont verticalement intégrées. En effet, elle devra garantir des débouchés stables par une valorisation optimale de la production pétrolière nationale. Ce qui entrainera une entrée massive de devises, tout en permettant des effets induits sur les autres agrégats macro-économiques. Elle devra aussi être la source de créations d’autres entités économico industrielles

 

Soyez plus clair, Monsieur TATY ! Comment cette société pourrait - elle permettre l’industrialisation du pays ?

Ecoutez ! Plusieurs entités industrielles en rapport avec les hydrocarbures pourront se créer à court, moyen et long termes, telles que: une entité en charge de l’exploration et de la production, une entité de raffinage, une entité de transport par voie maritime (tankers) par route, par pipelines, une entité de stockage, de marketing et de distribution, une entité de trading (commercialisation) une entité de pétrochimie et aussi une entité en charge de la gestion des participations Etat issues des différents contrats pétroliers tant sur le plan national qu’international. Ce n’est pas moins de sept entités économiques et industrielles de grandes envergures, avec des effets d’entrainement sur l’ensemble du tissu économique national,  qui pourront voir le jour grâce à un secteur pétrolier redynamisé et plus en phase avec nos besoins de développement.

En outre, elle ouvrirait des perspectives réelles et majeures dans le cadre de l’internationalisation de notre industrie, notamment dans la sous région du golfe de Guinée, par des prises de participations et de mises en place de réseaux de distribution de produits raffinés (Gaz butane et stations services par exemples) etc. …. 

 

Et pour ce qui est du plan macro-économique ?

Le premier effet indéniable dans le cadre d’un secteur pétrolier encadré, serait celui d’une maîtrise  des recettes pétrolières de plus en plus importantes. Elle pourrait permettre aussi de revisiter la valorisation de notre part de brut, son placement sur les marchés internationaux, mais également, de booster  la fiscalité et la para- fiscalité pétrolière (un plus pour la trésorerie publique) lesquelles, à notre humble avis, sembleraient avoir des zones d’ombre,  malheureusement au détriment des caisses de l’Etat, mais sans que cela soit forcément et il faut le souligner, la faute de nos partenaires économiques.

La société nationale pétrolière, pourrait permettre, dans le cadre de ses activités maîtrisées, de créer des emplois tant directs qu’indirects (entre 3000 et 5000 pour l’ensemble des filières) et résorber en partie le chômage des jeunes Gabonais.

Par ailleurs, elle donnerait  une approche plus dynamique aux participations ETAT, lesquelles, pour leur grande majorité, sont des participations dormantes, parce que inactives et non créatives de valeur ajoutée ! Enfin, faire passer notre pays d’une fiscalité de rente à une fiscalité de développement ! C'est-à-dire d’une économie de Rente à une économie de développement  

 

Notez bien – à l’intention des lecteurs - quelle est la différence entre une fiscalité de rente et une fiscalité de développement ?

Vous avez raison d’insister sur ce point ! La fiscalité de rente est celle qui est en place au Gabon, depuis le début des années 1960 (et même un peu avant) et ce malgré quelques évolutions apportées depuis là. Elle trouve son crédo dans une réalité bien évidente qui est celle d’un fait : le Gabon notre pays reste effectivement un pays rentier, c'est-à-dire qui ne produit pas, mais qui vit de ses recettes forestières, minières et pétrolières. En conséquence, notre fiscalité reste une fiscalité attentiste, non dynamique, surannée et  non objective. 

A contrario, la fiscalité de développement est une fiscalité dynamique, anticipative, qui se base sur des objectifs de développement bien ciblés et qui reste en phase  avec le budget de l’Etat (budget par objectifs). Son adoption pourrait être un atout majeur pour notre économie (elle lui donnerait une plus grande lisibilité) et pour l’Emergence qui a besoin d’énormes capitaux, une opportunité pour se réaliser.

Nous sommes arrivés au terme de cet entretien, Monsieur TATY,  avez-vous un mot de fin ?  

(Regard rétrospectif…) J’aimerai tout simplement dire pour conclure que notre pays, le Gabon possède tous les atouts (économiques et humains) pour atteindre l’objectif de devenir un pays dit émergent d’ici à l’horizon 2025. C’est à notre capacité organisationnelle et à celle de mettre en place les piliers nécessaires à notre développement que nous pourrons ainsi atteindre nos objectifs. La création d’une société nationale pétrolière, de grande envergure, verticalement intégrée serait un de ces atouts. Elle permettra une maîtrise réelle de notre production pétrolière, mais sera aussi à ne point en douter, le fer de lance de la dynamique à insuffler à notre économie.

En effet, et à l’instar des pays du golfe arabo persique (Bahreïn, Koweït, Qatar, Abu- Dhabi, Oman) qui ont su gérer leur patrimoine pétrolier, en procédant à sa juste répartition dans l’ensemble du tissu économique, l’internationalisation de notre industrie pétrolière par la prise de participations et des investissements tous azimuts sur des marchés à forte valeur ajoutée sur la base des recettes y corollaires, donneront des résultats similaires à ceux de ces pays précités  que nous admirons tous aujourd’hui et que nous pouvons prendre comme des modèles.

Enfin, il est d’une évidence toute économique qu’une prise en mains bien élaborée et maîtrisée de notre secteur pétrolier, pourrait augmenter de près de 25 à 35%  nos revenus en la matière à court terme (2 à 3 ans) par l’optimisation de la vente de nos produits pétroliers (brut et raffinés) ainsi que par une fiscalité et une  parafiscalité mieux élaborées et mieux encadrées. Et de près de 40 à 50% à moyen terme (4 à 6 ans) par une gestion optimum de nos participations ETAT. L’internationalisation, grâce à une industrialisation OFF-SHORE de notre secteur pétrolier elle, nous permettrait d’atteindre la barre de 75 à 90% et même plus d’augmentation de nos recettes en moins de 10 ans. 

 

Monsieur TATY ! Vous ne manquerez pas aussi de souligner que l’un des préalables à la matérialisation de ce rêve, c’est  la prise en compte et la valorisation de toutes leS ressources humaines d’un pays ?

Bien évidemment ! Dans le train de l’émergence, personne ne doit être laissée sur le quai, afin que l’ensemble des gabonais puisse en saisir la portée et le bien fondé, pour plus tard en jouir des bienfaits…. En toute connaissance !

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Commentaires
C
Excellent article et analyse extremement pertinente. Bravo Mr Taty !!!
A
Ce propos est une analyse pertinente... Il reflète de la part de l'auteur une connaissance certaine de l'industrie pétrolière Internationale... L'impact ici annoncé du rôle de cette nouvelle entité nationale pétrolière sur l'ensemble de l'économie nationale, est plausible.... Notamment sur les aspects industriels et macro-économiques ... Très bonne analyse d'une cohérence toute remarquable...
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